Usurpation du titre d’« expert-comptable diplômé »

En date du 30 mars 2016, une dépêche de la Revue Fiduciaire Comptable intitulée « Le titre « expert comptable diplômé » peut-il être utilisé, même sans inscription à l’Ordre ? »  annonçait que la Cour d’Appel de Colmar avait estimé qu’un professionnel était en droit de mentionner « expert-comptable diplômé » et que la Cour de Cassation avait validé cette décision.

Le Conseil d’Administration d’ECE s’est adressé au Président du Conseil Supérieur de l’Ordre des Experts-Comptables afin de connaître la position de l’Ordre quant à cet arrêt rendu par la chambre criminelle de la Cour de cassation le 1er mars 2016 (Cass. Crim., 1er mars 2016, n°14-86.957).

Le Président de la Commission du Tableau du Conseil Supérieur de l’Ordre a répondu dans les termes suivants :

« Dans cet arrêt, l’une des questions posées à la Haute juridiction était celle de savoir si un expert-comptable diplômé qui n’était pas inscrit au Tableau, pouvait utiliser la mention «expert-comptable diplômé ».

La Cour de cassation a répondu par l’affirmative, allant, semble-t-il, à l’encontre de la doctrine retenue jusqu’à présent par l’Ordre des experts-comptables.

En effet, l’Ordre des experts-comptables a posé comme principe qu’une personne non inscrite au Tableau de l’Ordre, mais titulaire du diplôme, ne devait à aucun moment laisser penser au public qu’elle avait le titre d’expert-comptable sous peine de faire l’objet de poursuites pour usurpation de titre conformément à l’article 20 de l’ordonnance de 1945, et, le cas échéant, pour exercice illégal.

Ainsi, l’Ordre considère que la mention «expert-comptable diplômé » n’est pas suffisamment claire et emporte la confusion dans l’esprit du public.

Il est important de faire un bref rappel des faits et de la procédure de l’arrêt rendu par la Cour de cassation, le 1er mars 2016.

Dans cet arrêt, un administrateur judiciaire avait marqué dans sa fiche individuelle de la compagnie nationale des experts judiciaires en finances et diagnostique dans la rubrique « diplôme », « commissaire aux comptes et expert-comptable diplômé ».

Cette information « commissaire aux comptes et expert-comptable diplômé » avait été diffusée à l’ensemble du public par la compagnie nationale des experts judiciaires en finances et diagnostique.

L’administrateur judiciaire avait fait l’objet de dénonciation de faits d’usurpation du titre d’expert-comptable par l’un des associés d’une société dont il était chargé de défendre les intérêts.

L’administrateur judiciaire avait alors porté plainte pour dénonciation calomnieuse et menaces de mort réitérées contre l’auteur de cette dénonciation.

Le Tribunal correctionnel avait déclaré cette personne coupable du délit de dénonciation calomnieuse et du délit de menaces de morts réitérées.

La Cour d’appel avait confirmé le jugement correctionnel.

C’est à l’occasion de l’examen du pourvoi relatif au délit de dénonciation calomnieuse, que la Cour de cassation a jugé que l’administrateur judiciaire, diplômé d’expertise comptable mais non inscrit à l’Ordre, pouvait faire mention de son diplôme sans s’exposer au délit d’usurpation du titre d’expert-comptable, aux motifs que, d’une part, cette mise en forme de publication émanait de la compagnie nationale des experts judiciaires en finances et diagnostique, et d’autre part, la mention « diplômé » placée après les titres et non avant ne suffisait à attester de l’exercice d’une profession mais de l’obtention d’un diplôme qui en l’espèce était incontestable.

Dans ses motifs, la Haute juridiction met en exergue, au surplus, que les mentions critiquées figurent dans la rubrique « diplôme » de la fiche individuelle de la compagnie nationale des experts judiciaires en finances et diagnostique.

Il est évident que les faits de l’espèce ont justifié une telle prise de position de la part de la chambre criminelle de la Cour de cassation : l’information communiquée au public n’a pas été faite par l’administrateur judiciaire lui-même, mais par la compagnie nationale des experts judiciaires en finances et diagnostique.

Dans l’hypothèse où l’information « expert-comptable diplômé » avait été communiquée au public par le titulaire du diplôme, il est loisible d’imaginer que la Haute juridiction aurait eu un raisonnement différent.

Il est important également de souligner le contexte de cet arrêt : la Cour de cassation s’est prononcée dans le cadre de faits réprimés par le délit de dénonciation calomnieuse, et non d’usurpation de titre d’expert-comptable.

Cette décision est donc un arrêt d’espèce. »

Lors de réunion de la Commission du Tableau de l’Ordre qui s’est tenue le 5 juillet 2016, les membres de la Commission ont confirmé cette position consistant à dire que la mention « expert-comptable diplômé » n’est pas suffisamment claire et emporte la confusion dans l’esprit du public. Une personne non inscrite au tableau de l’Ordre ne peut donc s’en prévaloir. Elle ne pourra donc utiliser que la mention « diplômé d’expertise comptable ».